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billet d'humeur

Allons-nous mourrir de chaud, ou de soif ?

humeur de juillet 2019

Bonjour à toutes et à tous !

En février dernier, notre lettre décrivait les conséquences d’un refroidissement brutal sur la production agricole. Vous devinez  que ce n’est pas le scénario qui nous guette pour l’été en cours – ni dans les prochaines décennies.

Notre but n’étant pas de plomber l’ambiance, déjà assez lourde par le temps qui pèse, laissons aux médias (de masse) la tâche désagréable d’inventorier les endroits où il fait chaud sur Terre.

Quant à nous, tenons-nous en à un sujet plus léger que d’accoutumée et tentons d’apporter une réponse à la question suivante :

Allons-nous mourir de chaud, ou de soif ?

Un argumentaire convaincant ne saurait s’affranchir d’une définition rigoureuse des termes mis en débat. Usons du Littré comme référentiel commun :

Mourir : v.n. Cesser de vivre.
Chaud (avoir *) : s.m. Ressentir de la chaleur.
Soif : s.f. Sensation du besoin de boire.

Et pour lever toute ambigüité :

Boire :  v. int. Avaler de l’eau.

Attendu que les humains (nos médias?) s’intéressent plus volontiers à la mode vestimentaire qu’aux catastrophes écologiques et sanitaires à quelques encâblures de leurs frontières – phénomène sociétal connu sous le nom de distanciation épistémique du nombril -, le « nous » de la question sera ici envisagé dans son acception la plus courante : « nous, les français ».

Evolution comparée de la popularité, sur un célèbre moteur de recherche, des requêtes « changement climatique » (en bleu) et « soldes été 2019 » (en rouge). Notons que cet indicateur ne présage pas toujours du comportement adopté par la société. A titre d’exemple, la requête « Greta » arrive devant « Ceta » ces jours-ci.

Ces éléments sémantiques clarifiés, voyons donc de quoi les Français auraient le plus raison de (ou le plus tord de ne pas) s’inquiéter.

De la soif ?

La carte ci-dessous dresse la liste des arrêtés de restriction d’usage de l’eau en cours en France métropolitaine. Soyons clairs, il s’agit d’une sécheresse historique, voire même record dans certains départements. Mais ne nous éloignons pas de la question initiale.

Carte des arrêtés préfectoraux de restriction d’usage de l’eau le 25 juillet 2019 (d’après le site internet Propluvia)

Le niveau le plus critique, l’état de crise, concerne les départements en rouge. Dans cette situation, chacun conserve le droit de boire, et même de tirer la chasse. Aucun risque de mourir de soif, donc.

La question se pose en d’autres termes pour les foyers où l’eau ne coule plus au robinet, comme dans une quinzaine de communes de Haute-Saône desservies par camions-citernes. Heureusement que le pétrole coûte moins cher que l’eau minérale.

Du chaud ?

Entre les 46°C enregistrés à Vérargues dans l’Hérault, et les nombreux records qui « pleuvent » dans la moitié Nord de l’hexagone, le bulletin météo fictif présenté par Evelyne Dhéliat en 2014 pour l’année 2050 ressemble à un conte pour enfant.

Pendant l’été 2003, été caniculaire de référence, différentes sources estiment que la chaleur avait fait 15 000 victimes, soit 0,02% de la population française, majoritairement parmi les personnes agées. C’est tragique, mais cela reste un risque faible relativement aux guerres, famines, et épidémies, qui ont pu décimer jusqu’au tiers de la population européenne par le passé.

A première vue, nous n’allons donc mourir ni de chaud, ni de soif.

Et de faim ?

En Europe, les conséquences les plus visibles du changement climatique n’affectent pas (encore) les sociétés humaines, mais les écosystèmes. Dans le Jura suisse, des forêts de hêtres ont séché sur pied. En Ardêche, les chataigners pourraient disparaître à un horizon proche. Ces problèmes vont s’accélerer : presque aucune essence de nos forêts n’est capable de migrer assez vite pour s’adapter à l’évolution du climat.

Dans nos champs, un été sec comme 2003, ou innondé comme 2016, peut faire chuter d’un quart le rendement des principales cultures à l’échelle nationale (et de presque 100% à l’échelle d’une région agricole). Il y a de quoi s’inquiéter lorsqu’on lit que les canicules exceptionnelles d’aujourd’hui pourraient être la norme d’ici une cinquantaine d’année. Qu’en sera-t-il des canicules de 2050 ? Des pics à 55°C sont à envisager.